Monique Olivier, compagne de Fourniret. Soumission ou perversion ? Les enquêteurs tentent de démêler les liens troubles qui unissent le tueur en série et Nathalie sa femme.
Il m'aimait. Il le disait. On ne sait jamais
qui est l'autre mais lui, lui était là. Il me parlait de la
vie, de l'ordre des choses dans le règne animal, de la place du fort
et du faible dans le monde actuel. Je n'ai jamais fait partie des gagnantes,
sans lui je me serais faite dévorer par le premier venu.
Au début, je lui ai demandé si c'était mal, j'ai essayé
de ranger nos actes d'un côté ou de l'autre. Il avait la réponse
à toutes mes interrogations. Pour lui, le bien et le mal n'étaient
que des hochets donnés aux citoyens pour meubler leur vie afin de permettre
aux puissants de garder le contrôle. Il me disait que tout ceux arrivés
au sommet ne pouvaient pas avoir les mains propres et qu'il ne voyait pas
pourquoi nous, à cause de notre naissance, n'avions pas le droit à
ce qu'il y a de mieux.
Nous partagions tout, nous étions un couple. Il répétait
souvent qu'aucun de nous ne partirait sans l'autre. Chaque fois qu'il me mettait
au courant de ses actes, il me les décrivait comme si nous étions
deux à y avoir participer. Il ne faisait rien seul. Chaque fois j'étais
avec lui, dans ses paroles, dans ses explications. Il le faisait pour nous,
pour que nous ayons la possibilité d'être ensemble et me jurait
qu'aucune barrière ne l'arrêterait. Si j'étais avec lui,
si je lui donnais ma force. Il se nourrissait de mon amour et me jurait que
sans moi il n'était rien. J'étais la femme la plus aimée
du monde, la raison de vivre d'un homme capable de tout pour moi, pour nous.
J'avais la primeur de ces actes, une marque de confiance unique, un diamant
précieux, sans prix. Il me témoignait une confiance sans faille
et partageait chaque seconde de sa vie avec moi. J'en devenais partie prenante,
part entière. Ces actes étaient indissociables des miens. Je
n'avais pas besoin d'être là, physiquement. Dès qu'il
revenait, il me prenait dans ces bras et me racontait tout, sans ne jamais
rien omettre. Il racontait et racontait encore, des nuits entières,
jusqu'à ce que ses souvenirs deviennent les miens, jusqu'à ce
que nos vécus se confondent.
Je pouvais avoir confiance en lui comme en moi-même ; il ne me cachait
rien. Il déposait à mes pieds des pans de son existence et m'en
faisait cadeau, comme une offrande à notre amour, une bûche dans
notre âtre. Je vivais trois vies simultanées. Celle ou je me
retrouvais seul, celle ou nous étions les deux et celle qu'il partageait
avec moi, qu'il passait à mon doigt comme une nouvelle bague de mariage.
Aucune femme n'a été aimée comme je l'ai été.
Les hommes cachent une grande partie de leur existence. Mon mari renouvelait
quotidiennement son serment de fidélité et dressait pour moi
des autels sur lesquels il sacrifiait son intimité. Je recevais ces
offrandes comme une reine reçoit des marques de respect, des signes
d'allégeance.
Même si certains jugent, j'ai été une femme comblée.
Un homme m'a ouvert son cur, son esprit et n'a plus jamais eu de secret
pour moi. Je souhaite aux femmes de vivre une union similaire. Rien de se
qu'un homme peut offrir à une femme ne remplace la confiance aveugle,
l'oubli de soi, au nom de l'amour que nous nous étions juré
le jour de notre mariage.