Pour la première fois de son histoire, l'Eglise protestante de Genève (EPG) va procéder à des licenciements de pasteurs et de diacres. Onze postes vont être supprimés en raison des problèmes financiers de l'institution.


Si Dieu s'y met

Il y a deux mille ans, je collais dix préceptes sur un caillou et personne ne discutait. Mille ans plus tard, j'ai vu d'un bon œil de ne pas mettre toutes les richesses dans le même panier. Qu'une partie de mes fidèles ne dépense rien, considèrent que le bonheur se vole puisqu'il ne coûte rien n'était pas pour me déplaire. Je me suis accommodé de leurs visions des places de chacun de mes protagonistes. En pragmatique, je me suis dit que de moins fêter la mère de Jésus ferait tout cela de moins de jours de congés et tout cela de travail en plus, pour ma plus grande gloire. Ces réformes n'ont pas passé sans quelques grincements de dents et massacres divers, mais il n'y a pas de révolutions sans que qui que ce soit reste sur le bord de la route. De toute manière, je ne pouvais pas continuer ainsi, les recettes étaient inférieures aux dépenses et les vocations avaient tendance à me coûter de plus en plus cher. Les fastes du Vatican et les croisades vidaient mes coffres aussi sûrement qu'une canicule assèche un petit vieux. Le défaut du faste est qu'il faut toujours en faire plus. Plus grand, plus beau, plus cher et personne pour payer. J'aimerais bien savoir qui aurait les moyens de se payer la place centrale de Rome ou de Florence et de refaire Notre-Dame en plein Paris. À coût équivalent, je peux me payer quelques kilomètres dans le désert et faire travailler trois ou quatre émigrés au noir.
Depuis que mes brebis ont pris conscience de leurs acquis et qu'elles ne veulent rien lâcher, j'ai aucune chance de revenir à l'époque bénie où les aînés reprenaient les affaires de familles, le second entrait dans les ordres et le troisième se faisait soldat. Une petite guerre religieuse sur les quatre points cardinaux tous les vingt ans et les affaires ronronnaient. Mais la nature humaine est mesquine et dès qu'on lui donne un acquis, il s'y accroche comme une tique sur un clébard. Et ce n'est pas dans ses habitudes d'en perdre un pour en accepter un autre. Il suffirait de faire tourner les avantages sociaux et de ne pas les cumuler pour que tout soit équilibré. L'accumulation mène inévitablement à la chute, car il est impossible d'entasser les choses les unes sur les autres sans que la base ne prenne de l'épaisseur. Donc, inéluctablement, plus il y aura de gens qui tendront à aller vers le haut, plus il faudra de gens en dessous pour les soutenir. Comme ceux d'en bas ne supportent plus les odeurs de pieds et ceux d'en haut les odeurs d'aisselles, tout le monde s'accroche à ce qu'il croit posséder. Il suffirait que l'humain lise un peu et regarde derrière lui pour savoir que même ce qui a été réalisé pour moi doit être restauré régulièrement. Alors quant à garder en l'état le peu qu'il a…
J'ai eu beau ne pas introduire la retraite, l'assurance-chômage, le salaire des femmes, on va me reprocher ne pas avoir émis des actions dans les années quatre-vingt-dix ou de ne pas avoir offert des stock-options à mes employés.
Maintenant je me retrouve à dégraisser le petit personnel pour sauver les meubles et les quelques pierres qu'il me reste pour éviter la banqueroute.
Onze licenciements et je me console en sachant que je n'aurai pas droit aux défilés et diverses manifestations devant mon siège social avec menace de devoir verser des compensations astronomiques. On ne perd pas tout le temps sur tous les fronts.