Procès simulacre de justice à Outreau ou les accusateurs confondent le prétoire et la Star Academy.


Tant qu'il y aura des cordes

Tout le monde aimerait en avoir plusieurs à son arc. Il en faut beaucoup pour se prémunir de la chute. Depuis deux mille ans, les cordes actionnent les cloches, montent les voiles, sauvent des montagnards ou privent de liberté.
Impossible, sur une page, de faire la liste exhaustive de son utilité, de toutes ses facettes, en un mot d'en faire l'apologie. Corde de chanvre, corde de nylon ou en boyau de chat. La corde exprime des sentiments, se fait le symbole de la liberté et des dictatures ou se transforme en lien entre des hommes qui la tire à eux.
La corde est raide, nouée, pendante, cachée ; comme les émotions. Il n'y a pas un mois sans qu'une nouvelle utilité lui soit trouvée. Depuis peu, la corde est le dernier recours des innocents. Le rempart de l'opprobre et de la vindicte populaire.
Il y a quelques années, suite à l'arrestation de Marc Dutrou, beaucoup on brandi des cordes et proposé un lynchage rapide. Dans le même temps, beaucoup on découvert que la parole des enfants n'était pas prise en compte par les instances judiciaires. Rapidement elle est devenue d'or, d'argent, vérité absolue, car les cordes vocales enfantines ne peuvent que dire la vérité.
Mouvement de balancier rapide, depuis un mois, le procès d'Outreau tire sur la corde de la crédibilité de la justice et des témoignages d'enfants et des mères.
Qu'on le veuille ou non, en quelques semaines, plus aucun juge d'instruction ne prendra pour argent comptant le témoignage d'un enfant. Dix sept personnes ont passé vingt deux mois dans les cellules françaises menacés de cordes à vie.
La ficelle était tellement grosse qu'elle s'est effilochée rapidement. Plus de la moitié des inculpés ont été libérés, gardant la corde au coup, portant l'indélébile tâche de la suspicion, sous prétexte qu'il n'y a pas de fumée sans feux. Lorsque la corde glisse dans les mains, la peau brûle aussi sûrement qu'avec des flammes.
Qu'on le veuille ou non, la corde sera plus ou moins tendues, hormis pour celui qui s'y accroche pour y finir sa vie. La corde s'est tendue d'un coup, libérant l'accusé de toute culpabilité, comme si la mort était la seule voie possible pour se laver de la pire accusation.
La corde se trouve une nouvelle fonction, elle porte l'innocent. Il est encore trop tôt pour comprendre le rôle de celui qui décroche le pendu et de celui qui a fourni la corde.
Reste qu'une fois de plus, à force de tirer dessus, elle s'est brisée, laissant derrière elle les lambeaux d'une justice impartiale et des voies porteuses de vérité.